Behind The Scene : les marionnettes d’Imagicario
Le défi de mutation d’une compagnie artistique en entrepreneuriat
Dans leur studio d’artiste dans Saint-Michel, nous avons discuté ensemble des secrets de fabrication des bêtes magiques d’Imagicario et de leur univers à la frontière de la fiction! Bonne lecture et surtout, bonnes rêveries!
Les marionnettes plus grandes que nature d’Imagicario se baladent dans les rues de Montréal pour des spectacles impressionnants où leur univers féérique laisse souvent éberluer. Depuis son lancement, Imagicario a réalisé plus de 450 présentations sur 3 continents! Mais une grande partie du temps de cette entreprise est consacrée à la conception de leurs personnages, dans leur atelier.
La rencontre de deux passionnés
Depuis 2017, Imagicario se dédie à la production de spectacles de marionnettes grands formats destinés aux espaces publics. À la fois artistes scéno-plastiques, marionnettistes et échassiers, Helijalder Capristano Flores et Laetitia Bérubé Canniccioni se concentrent sur la réalisation de marionnettes aux mouvements organiques.
Helijalder se définit comme le co-directeur artistique et technique. Artiste multidisciplinaire d’origine péruvienne, il cumule plus de 15 ans d’expérience en création artistique. Il s’est entrainé en gymnastique artistique masculine auprès de la Fédération de gymnastique du Pérou et il a commencé sa carrière artistique dans une troupe de théâtre de rue, manipulant des marionnettes géantes.
En 2017, Laetitia se joint à l’artiste d’expérience Helijalder Capristano afin de créer une compagnie de théâtre de rue (Imagicario) se dédiant à la réalisation de marionnettes contemporaines multi-formats. Ensemble, ils créent les œuvres Parédolïa, Ginka, Les Kakous, Les Triplets de Nullpa et Les Soupis. Des projets auxquels Laetitia participe en tant que conceptrice, créatrice, gestionnaire de projet et interprète.
« Chaque marionnette nécessite ses propres mécanismes »
𝗖𝗼𝗻𝗻𝗮𝗶𝘀𝘀𝗲𝘇-𝘃𝗼𝘂𝘀 𝗹𝗮 𝗰𝗿𝘆𝗽𝘁𝗼𝘇𝗼𝗼𝗹𝗼𝗴𝗶𝗲? Cette »science » des animaux imaginaires est au cœur des fascinantes créatures inventées par Laetitia Bérubé et Helijalder Capristano. Pour arriver à créer des personnages vivants, les deux compères font une recherche approfondie sur la morphologie et la biomécanique des êtres vivants. Leur travail est une combinaison d’ art visuel, de théâtre physique et…. de science!
“Nous avons choisi de travailler les marionnettes habitées, un type de marionnette dans laquelle le manipulateur prend place directement, se dissimulant aux yeux des spectateurs. Pour nous, c’est une façon de laisser pleinement la marionnette vivre… Manipulée de l’intérieur, elle semble indépendante du marionnettiste, et toute l’attention est donc portée sur elle”. confie Laetitia.
Ce parti pris fait que les prouesses techniques sont invisibles à l’œil nu. La marionnette est imaginée comme prolongement du corps : “Nous utilisons des mécanismes qui fonctionnent par inertie. Par exemple, dans le personnage Ginka, les têtes d’oiseaux bougent toutes seules en réaction aux mouvements du corps. Pour arriver à ce résultat, nous assemblons des matériaux flexibles et réactifs.”
C’est ainsi que l’utilisation des échasses sort de l’ordinaire : elles sont toujours intégrées comme si c’était les pattes des personnages. Laetitia et Helijalder savent que leur travail est terminé lorsqu’ils voient des étoiles dans les yeux des enfants… et des adultes qui les accompagnent!
Qui est ce personnage à l’allure atypique, qui sillonne les espaces urbains? D’où vient-il et pourquoi est-il ici? Tant de questions peuvent être générées lorsqu’on rencontre Ginka. Parfois on l’aperçoit parmi les branches des arbres comme si c’étaient ses échasses, parfois on la rencontre face à face. On l’a vue danser, chanter, pleurer, on l’a vue être, simplement. Toujours accompagné de trois oiseaux majestueux et colorés, qui protège qui? C’est une symbiose intrigante.
C’est un spectacle présenté dans un format ambulatoire, sans parole, qui combine gestes et actions dans l’espace, utilisant différentes techniques de manipulation (inertie, directe, prothétique). “Nous prêtons temporairement notre corps pour être possédés par cette marionnette hybride. Sa présence est polyvalente, selon ce que l’espace nous permet, elle apparaît parfois sur ses échasses ou au sol à un niveau humain.”
La France comme horizon
Une fois par an, Imagicario démonte ses marionnettes géantes et plie bagage pour d’autres contrées! “ Même si les costumes peuvent paraître lourds, nous n’avons jamais payé d’extra pour le poids de la valise!” s’amuse Helijalder. A titre d’exemple, l’année dernière ils ont participé au grand Festin de los Muñecos – à Guadalajara au Mexique. “Mais nous avions besoin de structurer ses déplacements” avoue Laetitia.
“A l’origine, nous sommes une compagnie artistique. On est des spécialistes de marionnettes, pas de business! C’est là que le programme du Cabinet Créatif de la Piscine est entré en jeu”. Pour Imagicario, il s’agissait aussi de desservir une plus grande clientèle afin de répondre aux enjeux de saisonnalité.
Le duo lorgnait depuis longtemps sur la France, un pays qui a déjà des centaines d’années d’histoire de marionnettes. L’offre des festivals de rue y est très grande, Imagicario aurait tout intérêt à développer des partenariats pérennes dans ce pays. Mais pour s’intégrer dans ce réseau, il faut comprendre son fonctionnement, sa culture.. “Typiquement, il est nécessaire de savoir comment les douanes marchent là-bas”!, souligne Helijalder
Imagicario impressionne par la précision de son artisanat et ses ambitions internationales. Les projets d’Imagicario éveillent l’imaginaire qui sommeille en chacun de nous. Pour découvrir tous leurs projets, rendez-vous sur le site Imagicario ou consulter leur page Instagram.
En savoir plus sur le parcours
Auteur.e.s : Solene Dégoulange et Bérénice Hourçourigaray